Elle a créé sa maison d’édition : portrait d’Anaïs, des éditions Stone Marten

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Sa passion depuis toujours, ce sont les mots. Les mots qu’on dit, et surtout ceux qu’on écrit et qu’on lit. Ceux qui laissent des traces, qui marquent les esprits, qui peuvent changer le monde. À tel point qu’elle a décidé de s’accrocher à son rêve en créant sa maison d’édition. C’est ce qu’elle aimerait, Anaïs, que le monde change. Qu’il soit plus doux pour ses enfants, bienveillant, prônant les valeurs d’empathie, de solidarité et d’inclusivité. Portrait d’Anaïs, une frangine pleine de rêves mais avec les pieds sur terre, fondatrice-éditrice depuis 3 ans des éditions Stone Marten.

Qui est Anaïs, des éditions Stone Marten ?

Stone Marten, je l’ai « rencontrée » via les réseaux sociaux, sur Facebook. Elle y poste depuis plusieurs années des textes personnels, des pensées, des histoires. C’est sa plume qui m’a attirée, et son talent m’a retenue. N’espérez pas y trouver que du rose bonbon et des happy ends, elle n’a pas peur de ses pensées sombres, d’évoquer ses doutes, ses peurs, la dépression, l’angoisse face à un monde qui parfois la terrifie.

Mais elle éclaire ce monde par ses mots si justes, souvent poétiques, et remplis de sens. Seulement si écrire est dans son ADN depuis toujours, il y a quelques années, cela ne lui suffit plus. Elle ressent un besoin viscéral de donner la parole aux autres, de proposer des histoires par et pour les invisibles, les anonymes, mais qui ont pourtant tellement de choses à dire et à partager.

D’offrir une nouvelle façon de lire et d’aborder la littérature. Sa vision de l’édition.

Les livres édités chez Stone Marten se veulent inclusifs sans forcer le trait ni faire d’un handicap ou d’une particularité le sujet principal. Contradictoire ? Au contraire. Elle normalise ce que beaucoup perçoivent comme un problème ou une différence, dans deux albums jeunesse, et a participé à l’écriture d’autobiographies de deux femmes, combattantes, résistantes et résilientes.

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La place des femmes dans une société trop patriarcale, le monde laissé à nos enfants, l’inclusivité, la mise en lumière de sujets qui ne sont pas vendeurs… Le refus de ce qu’elle appelle « la culture du vide », du « put@clic », la difficulté à défendre une littérature engagée. Voilà certains sujets évoqués dans l’interview que Stone Marten a accepté de me donner.

Interview-portrait d’Anaïs, fondatrice des éditions Stone Marten

Les éditions Stone Marten fêtent leurs 3 ans d’existence au printemps 2024.

Comment est né ce projet, pourquoi ? Est-ce difficile de créer sa maison d’édition, d’évoluer dans ce milieu ? Peut-on être auteure et éditrice ? A quoi ressemble la vie d’une femme, entrepreneure, éditrice, maman ?

Je vous laisse lire l’interview de notre frangine Anaïs, femme aux multiples casquettes que je remercie encore une fois pour son témoignage et sa confiance. Et je lui souhaite beaucoup de courage et de réussite pour la poursuite de son beau projet que Frangine suivra de près !

Quelle est votre situation personnelle ?

Je suis en couple depuis 13 ans, mariée depuis 8 ans et j’ai 3 enfants, un petit gars de 10 ans et deux filles de 7 et 5 ans.

Quelle est votre formation initiale ? Votre « ancien » métier ?

Les Ressources Humaines, par dépit… Il fallait faire des études, l’anxiété m’a empêchée de quitter ma ville alors j’ai fait une formation dans ce domaine ici. 

Les livres et vous, cela a toujours été une grande histoire d’amour ?

Toujours. J’ai eu la chance d’avoir un grand-père maternel passionné par la littérature. Nous allions manger chez lui tous les mardis soir et tous les mardis soir, j’avais le droit de piocher deux ou trois livres dans sa bibliothèque. Il a nourri ma culture littéraire et très probablement ma façon d’écrire. 

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Et l’écriture ?

J’ai commencé à écrire à 12 ans. Ça a toujours été pour moi le moyen d’expression avec lequel je me sentais le plus à l’aise. C’est viscéral l’écriture. Je n’ai pas envie d’écrire, j’en ai besoin.

Vous avez une communauté de presque 20 000 personnes sur Facebook et Instagram, quel genre de textes et de pensées partagez-vous ?

J’écris avec spontanéité, sur des sujets qui me touchent : la maternité, des sujets d’actualité, sur les femmes, sur notre invisibilisation. 

Comment l’idée des éditions Stone Marten est-elle née ?

A cause de cette notion d’invisibilisation justement. Nous vivons dans une société qui prône la méritocratie, l’idée qu’il suffit de travailler et de le vouloir pour réussir. C’est faux et biaisé parce que ça ne prend pas en compte les facteurs qui peuvent participer à creuser des inégalités. Le milieu d’où l’on vient, le piston, l’argent, notre genre, notre couleur de peau. Ce sont autant d’éléments qui pèsent dans la balance. C’est hypocrite que de faire croire que l’on part tous du même point. En faisant ce constat, j’ai eu envie d’ouvrir une maison d’édition pour visibiliser les gens que la société laisse de côté. 

Quelles sont les démarches pour créer une maison d’édition ?

C’est assez basique, ouvrir une structure. Le plus compliqué, c’est l’édition en soi. Trouver un bon imprimeur, un bon infographiste. C’est un métier qui demande beaucoup de compétences. 

Concrètement, à quoi ressemble une journée-type pour la fondatrice d’une maison d’édition ?

Ma journée commence par mon rôle de maman et c’est une fois que mes enfants sont à l’école que je me consacre à mon travail. Je traite les mails, la comptabilité, l’administratif et les commandes de particuliers et de librairies via le site de La centrale pour les libraires.

Puis je consacre du temps à essayer de visibiliser les éditions Stone Marten : les publications sur les réseaux sociaux, les réponses aux messages… Je contacte aussi des médias pour faire de la publicité ou des possibles partenaires. Et certains me contactent spontanément, comme vous, comme des journaux locaux…

Et pour les deux livres jeunesse que j’ai écrits et édités, je veux aller au contact des enfants par des ateliers dans les écoles, les bibliothèques, les médiathèques… L’accueil varie, le fameux « pas de vague » dans l’Education Nationale est bien réel parfois, étant donné que j’ai fait le choix d’une littérature jeunesse inclusive (le handicap, l’homoparentalité…). Alors que quand j’ai des réponses favorables, l’accueil des enfants est top, ce n’est pas ce qu’ils retiennent de mes histoires !

J’ai des demandes de personnes via les réseaux sociaux pour les aider à écrire leurs histoires, leurs biographies, à relire, à conseiller… J’ai freiné ces sollicitations depuis que j’ai créé la maison d’édition sinon je m’éparpille et cela demande beaucoup d’énergie.

Pourquoi le pseudo Stone Marten ?

Le pseudo, c’est plutôt cocasse. Stone Marten signifie fouine en anglais. Cela faisait référence à ma grande passion pour le cinéma américain et pour les actrices et acteurs dont je donnais toujours les infos lorsque l’on me demandait. Une amie m’a surnommée pour rire la fouine d’Hollywood, l’a traduit en anglais et quand j’ai commencé à écrire sur les réseaux, j’ai pris ce pseudo et c’est resté ! 

Quant au colibri, ça fait référence à une légende des autochtones d’Amérique du Nord. Une légende qui explique l’importance de chacun faire sa part aussi minime soit-elle. Avec cette maison d’édition, j’essaie de faire ma part, de participer, à mon échelle à une société plus inclusive, bienveillante et moins inégalitaire. Le logo a été dessiné par Pink’Dermo, une artiste tatoueuse qui fait beaucoup de tatouages sur des cicatrices. Elle me l’a offert et à sa façon, tel un colibri, a fait sa part aussi. 

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Comment avez-vous choisi les livres édités chez Stone Marten ?

J’ai d’abord lancé de la littérature jeunesse avec Orlane Elliot, une jeune illustratrice qui fait de l’aquarelle et à qui j’ai demandé d’illustrer deux histoires pour enfants que j’ai écrites : Deva et la lune contrariée et Hawa Watu.

Puis, j’ai passé un an à écrire la biographie de Victorine Boyer, une jeune femme qui a affronté un cancer de l’utérus à 27 ans et un autre à 30 ans.

Pour finir, j’ai publié fin 2023 le roman d’Alexandra Bitouzet, une femme autrice et artisane lainière. Son roman est un roman profondément féministe et engagé et traite justement de la difficulté pour les femmes d’exister autrement qu’à travers leur statut d’épouse et de mère. 

Pourquoi de la littérature jeunesse inclusive ? Quel message voulez-vous faire passer ?

Si je suis quelqu’un de très optimiste, force est de constater tout de même qu’ouvrir des adultes à la différence et à la bienveillance, ça reste compliqué. J’ai vu à travers mes enfants combien il était facile à l’inverse de tout leur expliquer et combien ils ne portaient pas de jugement. Mes deux meilleurs amis sont gays, je crois aussi que c’est un message d’amour pour eux. S’ils ont la chance d’être papas un jour, je serai heureuse de savoir qu’ils pourront lire une histoire à leur enfant où leur famille sera représentée. 

Les deux livres pour adultes édités sont-ils des biographies ? Des romans autobiographiques ?

Le roman de Victorine est biographique. Celui d’Alexandra a un fond autobiographique. 

Éditez-vous vos écrits ?

Pas pour le moment. J’ai publié plusieurs séries littéraires sur Wattpad mais je n’ai pas sauté le pas pour mes romans. Il paraît que c’est toujours le cordonnier le plus mal chaussé ! Je crois aussi que c’est quelque chose de plus intime, qui demande plus de courage que d’écrire des livres pour les enfants ou la biographie de quelqu’un. 

Combien de livres avez-vous vendus ? Des prochaines publications sont-elles prévues ? 

Le livre qui s’est le plus vendu pour le moment est le roman biographique de Victorine Boyer à plusieurs milliers d’exemplaires. Le sujet (double cancer féminin) et sa notoriété sur Instagram y sont pour beaucoup dans cette visibilité.

Doucement mais sûrement, les commandes arrivent. De quelques exemplaires, je suis passée à des dizaines, puis des centaines et en 3 ans à quelques milliers…

Voilà pourquoi pour le moment, je travaille à la visibilisation de la maison d’édition. Je veux réellement faire perdurer ce projet et ne pas plier face à une société qui s’entête à laisser des gens dans l’ombre. Je continuerai à faire du bruit et taper aux portes pour mettre en lumière ce projet et ses valeurs. 

Ce projet est-il difficile à rendre viable ?

Oui, c’est compliqué car c’est de la littérature engagée. La littérature jeunesse froisse notamment beaucoup de gens. Quant aux autres maisons d’édition, il faut savoir que c’est un milieu concurrentiel et j’ai pu constater au début de cette aventure la frilosité de certaines d’entre elles à simplement échanger sur leurs outils ou autres pour évoluer et réussir. 

Comment conciliez-vous votre vie de femme entrepreneure, de maman et votre double activité ?

Comme je peux ! Et en jonglant, comme énormément de femmes. J’ai souvent évoqué la charge mentale et combien il est compliqué en tant que femme de trouver un équilibre. 

Femme, maman, entrepreneure, auteure, chef d’entreprise… C’est une façon de vous épanouir d’avoir plusieurs casquettes ? Un besoin ? Un projet de vie ?

Une façon de profiter de chaque seconde. La vie est trop courte. C’est bateau comme phrase mais tellement vrai. Il faut foncer et croire en soi. 

Un message pour nos Frangines lectrices si elles désirent commander un livre de votre maison d’édition ?

Si vous êtes maman, je ne peux que vous recommander Hawa Watu pour vos enfants. C’est un conte philosophique qui rappelle l’importance de croire en ses rêves malgré la réticence des adultes… Je crois que si j’avais lu ce livre petite, je n’aurai pas attendu 35 ans pour oser réaliser mes rêves…

Pour suivre Stone Marten sur les réseaux sociaux :

Les livres disponibles aux éditions Stone Marten

Pour commander un livre (ou plusieurs !), rendez-vous sur le site www.leseditionsstonemarten.fr

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